Par un arrêt en date du 16 décembre 2020 (Cass. Soc. 16 décembre 2020, n°18-23.966 F-P+B+I), la Haute juridiction précise que même lorsqu’il est justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut causer à ce dernier, en raison des circonstances vexatoires l’ayant accompagné, un préjudice dont il est fondé à demander réparation.
Il est de jurisprudence constante que lorsque le licenciement est prononcé dans des circonstances vexatoires, le salarié est fondé à solliciter des dommages et intérêts.
Pour rappel, cette indemnisation est indépendante de la réparation d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En effet, le licenciement peut être à la fois injustifié et accompagné d’un abus de droit, au regard des conditions vexatoires de ce dernier [1].
Dans une telle situation, il pourra donc donner lieu à deux réparations distinctes, l’une au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, et l’autre, au titre de la réparation du préjudice tenant aux conditions vexatoires de cette rupture [2].
En effet, aux termes de l’article L1222-1 du Code du travail, l’employeur et le salarié sont tenus d’exécuter de bonne foi le contrat de travail. Ce principe a vocation à s’appliquer, aussi bien durant l’exécution que lors de la rupture du contrat de travail.
Par conséquent, lorsque l’employeur discrédite ou porte atteinte à la dignité du salarié lors du licenciement, son comportement fautif cause un préjudice à ce dernier qui doit être indemnisé [3].
Par exemple, la Cour de cassation a considéré comme vexatoire le licenciement prononcé :
Par la mise à la porte immédiate d’un cadre de direction, suivie trois jours après de l’annonce de son licenciement dans la presse [4] ;
Par l’employeur ayant interdit l’accès de l’entreprise durant la durée de la procédure de licenciement, au salarié à l’encontre duquel il n’est invoqué aucune faute grave et que, sans nécessité, il fait forcer les tiroirs de son bureau contenant des affaires personnelles [4].
La Cour de cassation précise par cet arrêt du 16 décembre 2020 que même lorsque le licenciement pour faute grave est justifié, il peut néanmoins causer un préjudice au salarié devant être indemnisé lorsqu’il est prononcé dans des circonstances vexatoires.
Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour faute grave. L’employeur s’était « répandu en public sur les motifs du licenciement du salarié en prétendant qu’il prenait de la drogue et qu’il était un voleur », ce qui constituait un licenciement vexatoire selon le salarié.
Si la Cour d’appel a rejeté sa demande de dommages et intérêts, la Cour de cassation a censuré cette décision car
« même lorsqu’il est justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut causer à celui-ci, en raison des circonstances vexatoires qui l’ont accompagné, un préjudice dont il est fondé à demander réparation ».
Pour rappel, le montant de réparation est laissé à l’appréciation souveraine des juges du fond.
[1] Cass. soc. 22 juin 2016, n°14-15.171.
[2] Cass. soc., 17 juillet 1996, n° 93-41.116.
[3] Cass. Soc. 26 juin 2019, n°17-26.898.
[4] Cass. soc., 29 novembre 2984, n°82-41.540.
[5] Cass. soc., 7 juin 2006, n°82-41.540.
Kevin Bouleau